Appel à contributions« Face aux crises, des planifications sont-elles possibles ? »
L’AFEP est une association scientifique généraliste dont l’objectif est la promotion du pluralisme dans le champ de l’économie académique. Le congrès annuel de l’AFEP est un moment important pour l’association et pour la communauté des économistes. Il permet de faire vivre le pluralisme des théories, des méthodes et des objets. Au-delà, cette approche encourage le dialogue et l’interdisciplinarité au sein de l’espace des sciences humaines et sociales. C’est pourquoi les propositions de communication autres qu’en économie (sociologie économique, gestion, anthropologie, géographie, aménagement, sciences politiques, histoire, philosophie, etc.) sont souhaitées et encouragées. Dans l’esprit d’ouverture qui caractérise l’approche pluraliste promue par l’AFEP, le congrès reste ouvert à toutes thématiques ou approches. Les propositions ne portant pas explicitement sur la thématique du congrès sont donc bienvenues. Des propositions d’ateliers thématiques (ouverts ou fermés) seront également fortement appréciées.
L’économie institutionnaliste a montré que les sorties de crise passées ont redessiné les lignes de partage entre le marché et l’intervention publique.
1. Vers une trajectoire consciente de sortie des crises ? Dans la gestion des crises, les stratégies d’évitement et/ou de corrections immédiates sont apparues comme les solutions privilégiées par la puissance publique. Mais l’ampleur, la nature et la multiplication des crises appellent aujourd’hui à questionner ces stratégies et à en penser de nouvelles. Dans le même temps, les marqueurs d’une possible régulation consciente, construite, de l’économie montent comme un fait historique nouveau. La contrainte du changement écologique apparait de plus en plus forte et sa temporalité structurante. Partout les sociétés sont confrontées au franchissement des limites planétaires et aux inégalités écologiques. Face au défi de l’encastrement de la contrainte du changement écologique dans le fonctionnement de nos économies et nos sociétés, quelles sont les stratégies à mettre en œuvre ? Le développement d'activités dites "vertes" peut-il se passer d'une articulation avec l'échouage du capital dit "brun", qui suppose la détérioration brusque et (relativement) imprévue de sa profitabilité ? Quelle valeur affecter aux émissions évitées pour orienter les investissements publics et privés vers une trajectoire de décarbonation plus ambitieuse ? Et quel rôle peut-on espérer donner à la valeur tutélaire du carbone, qui reflète certes une référence dont tiennent compte les acteurs dans leurs plans d'investissement mais qui peine cependant à se concrétiser sous la forme d'un signal-prix crédible ? Quels que soient les processus de production futurs, leur conception et leurs finalités appellent à porter l’attention au développement d’une régulation consciente et collective, donc fondamentalement politique, de l’économie, de ses structures, des arrangements institutionnels qui la fondent, tenant compte de l’incertitude radicale qui accompagne la crise systémique actuelle. 2. Le retour des planifications ? Les outils à disposition d’une construction collective du futur ne sont pas si nombreux. La planification est l’un d’entre eux. Elle ressurgit d’un passé qui l’a associée aux impasses de la planification soviétique. Mais la planification est omniprésente dès les années 1930 et au moins jusqu’à la fin des années 1970 aussi bien à l’Est, à l’Ouest qu’au Sud. Sa grande plasticité doit être soulignée. Il ne s’agit donc pas de la planification mais des planifications. L’histoire de la pensée et l’histoire économiques offrent ici des perspectives importantes. L’expérience soviétique soulève une série de questions, en particulier celle de priver les acteurs d’une économie de coordinations et de coopérations, volontaires et horizontales. Questions qui libèrent la possibilité de reconsidérer cet instrument qui s’implante à nouveau dans le présent, via notamment la planification écologique. Le retour actuel de la planification dans les agendas politiques et économiques peut être lu à plusieurs niveaux, que cet appel à contributions a l’ambition d’interroger. Un nouvel interventionnisme étatique ? Aujourd’hui, des expériences d’envergure de planification écologique se multiplient. C’est le cas en France (Secrétariat Général à la Planification Écologique), en Europe (Green Deal), aux États-Unis (Green New Deal ramené à l’IRA) ou encore en Chine (Civilisation écologique). Les modalités d’intervention publique, en particulier des politiques industrielles, les dotations des institutions financières publiques et des banques de développement ou encore le lancement de plans de relance vert dans les pays Occidentaux semblent amorcer un changement de cap en matière d’intervention étatique. Compte tenu de leur ambition de « décarboner la société » et des moyens financiers dédiés, ces politiques laissent penser au possible retour d’un interventionnisme étatique direct et planifié, en rupture avec le modèle dominant de l’État néolibéral des quarante dernières années. Toutefois les conditions actuelles diffèrent de celles qui ont prévalu lors des expériences planistes nationales d’après-guerre ce qui ouvre sur un interventionnisme étatique dans une forme renouvelée. Il importe donc de comprendre et d’analyser le modèle et les pratiques de planification qui caractérisent ce « nouvel » interventionnisme étatique. Démocratie politique, démocratie économique La réintroduction de la planification peut-elle être l’occasion d’aller plus loin ? Dans l’histoire de la planification et l’évaluation de sa portée ou de son échec, coordination par le marché et démocratie sont régulièrement associées. Ce lien mérite d’être interrogé : comment des planification(s) vertueuse(s) s’articulent-elles avec les institutions démocratiques ? La coordination par le marché est-elle un outil nécessaire à la démocratie ? Mais démocratie politique et démocratie économique ne concordent pas. Comment les planifications peuvent-elles contribuer à leur mise en cohérence ? Les planifications peuvent-elles être des choix collectifs fondés sur la démocratie économique et qui contribueraient à la renforcer ? Les échelles des planifications L’intervention publique accompagne la possibilité d’une régulation consciente et collective des crises. Mais elle n’est pas le seul support. Des initiatives décentralisées, plus ou moins convergentes, pour la transition ont été et sont observées. Elles mêlent action publique et action citoyenne, entreprises (dans leurs deux composantes employeurs et travailleurs), organisations non marchandes, à différentes échelles, faisant surgir dans le présent des formes de planification locales, très horizontales, à côté de la planification étatique. Dans ces initiatives, la démocratie économique est mobilisée comme une possibilité d’action, combinant à la fois des objets conflictuels et de possibles compromis, pour l’instant à la portée incertaine, pour penser et produire le futur. Ces planifications locales, « sous-étatiques », contribuent à renouveler l’action publique. De ces constats émerge aussi la question de la coordination de ces planifications locales à une échelle supérieure. 3. Penser les planifications pour sortir des crises Les planifications peuvent-elle être envisagées comme un support de la construction démocratique du futur ? Que cela suppose-t-il en termes de théorisations critiques de la transition, entendues comme trajectoire consciente de sortie des crises ? Comment se construisent et se diffusent les idées autour des pratiques sociales innovantes allant dans cette direction ? Comment des compromis locaux peuvent-ils être légitimés et s’institutionnaliser dans un régime alternatif ? Quels sont les espaces, les organisations et les échelles possiblement impliqués dans ces processus ? Par exemple, que dit au monde la proposition africaine de fixer un prix mondial du carbone ? Comment se construisent les décisions ? Avec quels savoirs (comment compter ?) et quels moyens (quel appareil administratif et technique ?) ? Comment la planification peut/pourrait-elle s’imposer aux acteurs économiques et financiers, dans le contexte actuel marqué par quarante années de politiques néolibérales en faveur du capital ? Comment l’État actuel pourrait-il construire un rapport de force (favorable) avec ces acteurs, alors que l’effort de socialisation du risque laisse de côté la question de l’appropriation privée du profit ? Telles sont quelques-unes des questions impliquant une planification en partie déterminée par des questionnements inédits liés à la nature des crises que l’appel à communications invite à documenter.
Trois types de soumissions sont possibles :- Proposition de communication scientifique : chaque auteur·trice soumet une proposition (avec un résumé étendu, c’est-à-dire d’environ 2 pages avec références bibliographiques) ; - Proposition d’atelier thématique fermé : chaque coordinateur·trice d’atelier propose une thématique et une liste d’intervenant·e·s., assure la collecte des propositions de communication et anime l’atelier le cas échéant ; - Proposition d’atelier thématique ouvert : chaque coordinateur·trice d’atelier propose une thématique qui, si elle est acceptée, peut donner lieu à un appel à contributions spécifique envoyé par le·a coordinateur·trice. Les communications regroupées dans l’atelier thématique seront choisies parmi les propositions de communication scientifique répondant à l’appel général et/ou à cet appel spécifique.
« Chaque coordinateur·trice d’atelier est invité.e à prêter attention à la parité femmes/hommes et à la diversité des personnes choisies pour intervenir »
Date limite d’envoi des propositions de communications ou d’atelier thématique, via la plateforme : https://afep2024.sciencesconf.org (environ 2 pages) : 31 janvier 2024. Notification d’acceptation des ateliers thématiques : au fil de l’eau Notification d’acceptation des communications : 31 mars 2024 Notification d’acceptation des communications soumises à des ateliers thématiques : 10 avril 2024 La journée du 2 juillet est réservée aux doctoriales et fera l’objet d’un appel spécifique. Pour plus d’informations : doctorants@assoeconomiepolitique.org. Le congrès conjuguera des sessions plénières et des ateliers thématiques en parallèle. Afin de favoriser les échanges avec les collègues non francophones, les communications en anglais sont bienvenues.
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